" Nous allons être demain en face de la grande réforme fiscale et ce sera la première pierre de touche du radicalisme reconstitué.
Oui, nous voterons tous énergiquement, passionnément pour instituer l’impôt général et progressif sur le revenu, sur le capitalisme et sur la plus-value avec déclaration contrôlée.
Nous le voterons parce que, quelle que soit la répercussion possible, et il en est toujours, les impôts ainsi établis sur le grand revenu et le grand capital sont moins fatalement répartis et pèsent moins brutalement sur la masse que les impôts directs qui atteignent directement le consommateur ou le paysan sur sa terre et sur son sillon.
Nous le voterons donc et nous le voterons aussi parce qu’il serait scandaleux, je dirais parce qu’il serait humiliant et flétrissant pour la France qu’à l’heure des crises nationales, quand on allègue le péril de la patrie, la bourgeoisie française refuse les sacrifices qu’a consentis la bourgeoisie d’Angleterre et la bourgeoisie d’Allemagne.
(…)
Nous voulions qu’avant tout, l’impôt progressif et global servît à dégrever les petits paysans, les petits patentés, de la charge trop lourde qui pèse sur leurs épaules et nous voulions que ces ressources largement réalisées servent aussi à doter vraiment et substantiellement les grandes œuvres de solidarité sociale, faisant de la simili-assurance contre la vieillesse une réelle assurance sociale contre l’invalidité, contre la maladie, contre le chômage, développant les entreprises de logements sains et à bon marché pour arracher les travailleurs à la misère des taudis."(…)
Jean Jaurès discours à Limoges à l’occasion du congrès fédéral de la fédération socialiste de la Haute-Vienne, le 24 octobre 1913.